A la fin de la Guerre de 39-40, les Américains ont pris une grande avance dans le domaine des Voilures Tournantes. Ils ont utilisé des appareils en opération et construisent certains en série. La France se décide à investir dans la conception et la fabrication des hélicoptères. Pour cela, il faut des ingénieurs compétents et ils vont les trouver outre-Rhin.
A la fin des combats en Europe, une mission française se rend en Allemagne pour y recruter les meilleurs spécialistes dans ce domaine. Le plus célèbre est le Professeur Heinrich FOCKE qui travaillera pour la SNCASE (Société Nationale de Construction Aéronautique du Sud-Est). Il sera suivi par une dizaine d’Ingénieurs et Techniciens
Deux projets sont à l’étude : le premier, le SE 3000, n’est qu’une version améliorée de l’impressionnant FA 223 « Drachen ». Il en conservera les caractéristiques et surtout la complexité mécanique dû à la présence des deux rotors latéraux.
Le deuxième projet, le SE 3101, est beaucoup plus simple. Il s’agit d’un appareil léger destiné à la mise au point d’un système rotor performant. Le prototype est commandé par l’Etat en décembre 1946. Les travaux de définition se poursuivent jusqu’au milieu de l’année 1947. Le Professeur FOCKE et la plupart de ses collaborateurs démissionnent de la SNCASE. Les ingénieurs français continuent le travail sous la direction de l’Ingénieur en Chef RENOUX.
L’appareil qui prend progressivement forme est de conception simple. Le fuselage est constitué d’un treillis fait de tubes d’acier. Un pare-brise protège le pilote qui parfois va voler sans casque. Deux grosses roues et une roulette de nez donne une très bonne assise au sol. Le couple du rotor principal est compensé par deux rotors de queue fixés au sommet d’un empennage papillon. En contrôlant leurs variations de pas, il est possible de piloter la machine en tangage et en lacet, le roulis restant l’apanage du rotor principal.
Pour faire vite, le SE 3101 est équipé d’éléments mécaniques à un FOCKE FW 61. L’un des rotors tripales de 7,5 m de diamètre est utilisé ainsi que le moyeu. Le moteur en ligne, un Mathis développant une centaine de chevaux, est placé directement sous le rotor.
Avec une masse à vide de 535 kg, le SE 3101 dispose d’environ un cheval pour 6 kg. Ceci est très modeste mais en théorie doit permettre à l’appareil de prendre son envol.
Les premiers essais pratiques vont contredire la théorie. Le 15 juin 1948, la première tentative de décollage se solde par un échec. Le pilote d’essai, Henri STAKENBURG, lance le moteur, le rotor est embrayé, le moteur rugit, les pales brassent l’air mais l’hélicoptère ne décolle pas d’un centimètre. La conclusion est immédiate : manque de puissance.
On se souvient qu’un jeune pilote d’essai au petit gabarit vient de rejoindre la SNCASE, il s’agit de Jean BOULET. Jeune et mince à l’époque, il pesait 15 kg de moins que l’autre pilote d’essai. Il réalisa un stationnaire à 30 cm du sol. C’était le début de sa grande carrière de pilote d’essai.
Les essais vont se poursuivre avec de nombreux problèmes : Les rotors de queue gaspillent énormément de puissance. Les pièces s’usent prématurément en subissant des contraintes mécaniques qui restent mal évaluées à l’époque.
En bref, la formule n’est pas satisfaisante.
L’appareil doit être présenté au Salon du Bourget en mai 1949 mais quelques jours auparavant un incident survenu lors d’une finale d’autorotation endommage gravement l’appareil. L’équipe Technique va travailler d’arrache-pied pour que le SE 3101 soit présenté au Salon devant le public le 14 mai 1949. Mais c’en est terminé pour l’appareil, faute de disponibilité du moteur MATHIS. Le SE 3101 finit sa carrière d‘hélicoptère expérimental en janvier 1950. En dix-huit mois, il a cumulé un vingtaine d’heures de vol.
Mais cette expérience n’a pas été inutile puisque la SNCASE a acquis une solide réputation dans le domaine des Voilures Tournantes. Le SE 3101 va donner naissance au 3110 dont la mécanique va inspirer l’ALOUETTE 1 mais avec un rotor anticouple classique.
Jean BOULET raconte
Le Directeur Technique trouvait que l’appareil avait du retard et voulait que je commence les essais en translation. Lorsque je suis arrivé à Villacoublay, l’appareil était fin prêt. |
Voilà une belle histoire que j’ai pu vous écrire grâce à Frédéric LERT et Jean BOULET.
Messages
22 septembre 2015, 17:18, par DELAFOSSE
Né la même année que l’Alouette I, j’ai connu et pratiqué l’Alouette II et Alouette III toute ma carrière....C’est avec grand plaisir que je plonge dans ce type de récit historique dont tu as le secret .
Ces merveilleuses machines n’ont pas fini de voler, elles rejoindront encore le ciel bien après nous !
27 octobre 2015, 10:17, par Potelle
Merci Francis d’avoir apprécié