30 ans d’hélico rouge à Annecy

vendredi 16 juillet 2021

Article paru dans la Revue : La montagne et l’Alpinisme par Francis Delafosse
1964-1994. Depuis trente ans, l’hélicoptère de la Protection civile de Haute-Savoie basé à Annecy est devenu un élément irremplaçable dans l’organisation du secours en montagne. Petit historique en forme de bilan.
Le fait de n’avoir pu secourir deux alpinistes, Vincendon et Henry, en perdition et répétés vivants dans le massif du Mont-Blanc, marqua profondément les services publics et les responsables du Secours en montagne au début de l’année 1957.
Deux ans plus tard, le Service national de la Protection civile décidait d’affecter son premier hélicoptère en province en choisissant Grenoble, capitale des Alpes, comme tout Premier lieu d’activités. Il était déjà question, alors, de couvrir la zone du Mont-Blanc avec un détachement en période estivale composé d’une Alouette II et de ses deux équipages.
Septembre 1963, l’état-major de la protection civile désignait Jean-Louis Lumpert pour entreprendre la mise en place une implantation nouvelle dans la région d’Annecy. Et c’est à partir de la base hélicoptères de Grenoble que deux pilotes volontaires, formés et motivés, seront recrutés. Francis Riera et Christian Graviou furent ténus, ainsi que le mécanicien d’équipage Paul Rouet. Louis Maret remontera de Nice en qualité de chef mécanicien et l’arrivée £té Jacques Bérard, en provenance de Clermont-Ferrand, complétera cette équipe.

Vol stationnaire dans les séracs du Mont-Blanc.
Le 1er avril 1964, par une belle journée de printemps, une Alouette II rouge posait pour la première fois ses patins sur l’aérodrome d’Annecy-Meythet. Son premier vol dans la région sera effectué peu après au profit de la Foire de la Roche-sur-Foron, et sa première mission de secours le 30 mai de l’hôpital d’Annecy à l’hôpital Desgenettes, à Lyon. Ce jour-là, à 12 h 15 précises, l’équipage Riera-Rouet se posait sur la DZ de l’hôpital d’Annecy et, accompagné d’un médecin interne, embarquait un blessé grave victime d’un accident de la route.
Installé provisoirement dans ses locaux de Meythet, l’Aéro-club d’Annecy accueillera le mieux possible cet appareil et ses trois équipages. Dans la baraque en bois, une pièce sera mise à leur disposition pendant environ six mois : on y installera un bureau, un magasin et même un dortoir quand les nuits seront frisquettes et les frais de missions épuisés ! (l’attribution des logements familiaux se faisant attendre).

Implantation de la base d’Annecy-Meythet
Pleinement convaincues de l’utilité de ce service, les autorités départementales (Préfecture, Conseil général) ne ménageront pas leur appui total. Les crédits pour la construction de la base étaient déjà votés et, dès le mois de juillet 1964, les travaux commençaient à un rythme accéléré. Confiés aux architectes Brière et Gouaux, ils furent terminés le 20 décembre et les bâtiments réceptionnés le 15 janvier 1965. Ils comprenaient - et comprennent toujours - un vaste hangar circulaire de 15 mètres de diamètre (original mais pas toujours pratique...) et, accolée, une partie rectangulaire regroupant locaux administratifs ; garage et atelier auto ; bureaux divers ; magasin technique et salle opérationnelle.
On ne peut évoquer l’installation des équipages à Annecy sans soulever le problème relatif, à l’époque, à leur détachement de Chamonix où ils assuraient les secours, en relais de leurs collègues de la base de Grenoble. En effet, dès les premiers déplacements à Chamonix, l’endroit réservé aux posés de l’hélicoptère changera chaque fois que les riverains en feront la demande par pétition générale. Il fallut l’unique soutien de l’un des adjoints au maire pour que se règle définitivement ce problème avec l’attribution d’un emplacement qui n’est, en fait, qu’une petite clairière d’un terrain boisé du village des Praz. On la baptisera, pour toujours, la « DZ des Bois ».
1965 : cette première année d’activités sera marquée par près de 150 missions de secours, dont 40 sauvetages en montagne et 38 transports de blessés et malades. En outre, les équipages seront sollicités lors des inondations qui, en octobre, dévasteront le centre de la France.
Aux travaux administratifs et aux tâches d’entretien qui leur incombent, les équipages ajoutent les multiples contacts que la base d’Annecy doit entretenir avec les divers organismes publics et privés. Ils assurent également les relations avec les éventuels utilisateurs de l’hélicoptère, la formation des secouristes héliportés et la reconnaissance de nouvelles DZ auprès des hôpitaux. Deux ans après sa création, la base d’Annecy effectuait déjà 391 missions dans l’année, soit plus d’une par jour en moyenne... Un bilan d’activités qui ne cessera d’augmenter et qui a été rendu possible grâce à l’arrivée de l’Alouette III à Meythet, où les équipages l’attendaient avec impatience.
À peine sorti d’usine, cet appareil est arrivé à Annecy le 25 juillet 1964, pas encore peint en rouge, comme le veut le règlement, mais déjà pleinement apprécié pour ses performances en haute montagne et pour son côté pratique puisqu’il est bien adapté aux transports médicalisés et aux hélitreuillages.
Les six hommes des trois équipages, animés de la même passion autour de leur fabuleuse machine, connaîtront les débuts d’une grande aventure. Et ils veilleront à transmettre à leurs successeurs tout ce que le secours héliporté en montagne leur a apporté, en expérience, en don de soi, dans la pratique d’un métier sans doute difficile mais exaltant.

Aujourd’hui, cinq fois plus de missions
De plus en plus sollicités, les hélicoptères de la Sécurité civile sont maintenant connus de tous et unanimement appréciés. Ils sont également l’un des éléments indispensables de la chaîne des secours dont l’efficacité n’est-plus à démontrer. La base d’Annecy a vu récemment l’arrivée progressive d’une nouvelle vague de personnel venue se joindre aux rares anciens auxquels il reste malgré tout quelques années d’activité avant la retraite. Ce renfort a été rendu indispensable pour garantir la mise en œuvre d’un appareil opérationnel toute l’année sur la base d’Annecy et d’un second qui continue d’assurer les permanences à Chamonix hiver comme été.
Cette année a vu également l’arrivée à la base d’une équipe de sauveteurs-montagne des sapeurs-pompiers accompagnée d’un médecin en période d’activité intense. Leur présence auprès des équipages devrait permettre un niveau de performance et une qualité de mission remarquables.

Activité aérienne à Annecy 1964
52 personnes secourues 280 heures de vol
1993 : 644 personnes secourues 820 heures de vol

En trente ans : 9 000 personnes secourues 15 500 heures de vol

Parc actuel de la Sécurité civile
Alouette III : 26
Dauphin C : ! 4
Écureuil B, B1 ou B2 : 6

Implantation des 20 bases hélicoptères de la Sécurité civile :
Lille, Le Havre, Granville, Issy-les-Moulineaux, Quimper, Lorient, La Rochelle, Clermont-Ferrand, Bordeaux, Pau, Montpellier, Perpignan, Marseille, Cannes, Grenoble, Annecy, Lyon, Strasbourg, Ajaccio, Bastia.

285 420 heures de vol et 12 887 missions réalisées par le groupement hélicoptères depuis 1957.

Personnel en activité à la base :
Gilles Bidon, Francis Delafosse, Yves Maréchal, Bernard Stoop, Michel Pierre, Jean-Michel Vialle, Noël Rivière, Jean-Luc Labeyrie, Vincent Saffioti. Chef de la base, Roland Boutard.

L’évolution des secours est aujourd’hui telle que la base effectue maintenant cinq fois plus de missions qu’aux premières années de son implantation.
L’arrivée probable d’un nouveau type d’appareil (le BK 117 qui sera expérimenté à nouveau l’été prochain) ne fera qu’ajouter un élan nouveau à l’activité à la base d’Annecy en espérant que d’ici peu, il sera possible d’en écarter les murs, d’en améliorer l’installation afin que cette infrastructure suive l’évolution technique et opérationnelle que connaîtront encore les années à venir.

LIVRES ET PASSION
⦁ Les compagnons de l’Alouette, J-L. Lumpert. Éd. Arthaud. 1973
⦁ Le secours arrive du ciel, R. Romet. Éd. Hatier. 1976
⦁ Secours extrême, J.-R. Belliard, R. Romet. Éd. Flammarion. 1984
⦁ ...Et le ciel t’aidera, G. Frison. Éd. France Empire. 1986

La dépose du Christ du Mont-Blanc
Le 15 août 1988, jour de la fête des guides à Chamonix, un équipage de la base d’Annecy dépose par hélitreuillage sur un sommet surplombant la vallée Blanche une statue en inox de deux mètres quarante de hauteur représentant « Le Christ du secours en montagne ». Après avoir reçu l’approbation de la Secrétairerie du Vatican et le soutien de la Présidence de la République, ce mémorial constitue un hommage à tous les équipages d’hélicoptères de la Sécurité civile, de la gendarmerie et du secours aérien privé, ainsi qu’à tous les organismes civils et militaires participant au secours en haute montagne ; il perpétue également le souvenir des 30 000 personnes secourues depuis l’apparition de l’hélicoptère en zone de montagne.

L'équipage Alouette III Sécurité civile avec Patrick Bros et Francis Delafosse sur la DZ des Bois durant l'été 1991 - Photo DR

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